Nudge, méthode douce pour inspirer de bonnes décisions

Soumis par Anonyme (non vérifié) le mar 04/10/2016 - 00:00
nudge

De petits détails, apparemment insignifiants, peuvent avoir un impact énorme sur le comportement des gens.

Pourquoi dessiner des mouches sur les urinoirs des toilettes de l’aéroport de Schiphol à Amsterdam ? Pour permettre aux hommes de mieux viser et pour réduire les dépenses de nettoyage. "Cela donne un but," dit Aad Kieboom, économiste et responsable du développement immobilier à Schiphol, et d’ajouter: "quand un homme voit une mouche, il cherche à l’atteindre." Les éclaboussures d’urine ont ainsi réduit de 80% grâce à cet insecte diptère aux formes trapues: de grands effets pour un petit changement. En fait, cette fausse mouche est un nudge, qui, en français, a deux sens: pousser du coude pour attirer discrètement l’attention de son voisin, ou donner un coup de pouce, encourager. Plutôt que d’employer contraintes et sanctions, carottes et bâtons, c’est une façon d’inciter en douceur les gens à changer leur comportement. Nudge, aussi paradoxalement dénommé paternalisme libertaire, est un concept élaboré par Cass R. Sunstein, professeur de droit à Harvard, et Richard H. Thaler, économiste à la Chicago University, et tous deux auteurs de l'ouvrage "Nudge: la méthode douce pour inspirer la bonne décision."

 

"De petits détails, apparemment insignifiants, peuvent avoir un impact énorme sur le comportement des gens. D’une manière générale, il faut partir du principe que tout compte," expliquent Thaler et Sunstein. Et de rajouter que "dans de nombreux cas, les individus prennent d’assez mauvaises décisions - qu’ils n'auraient pas prises s’ils y avaient consacré toute leur attention, s’ils avaient possédé une information complète, des aptitudes cognitives illimitées et une totale maîtrise de Soi (...) Qu’ils aient ou non étudié l’économie, beaucoup de gens semblent implicitement attachés à l’idée de l’homo economicus - autrement dit à la notion que chacun d’entre nous pense et choisit sans jamais se tromper, en toutes circonstances. Si vous parcourez les ouvrages d’économie, vous y apprendrez que l’homo economicus a des capacités intellectuelles équivalents à celles d’Albert Einstein, autant de mémoire “Big Blue”, le fameux super ordinateur d’IBM, et une maîtrise de soi qui ne le cède en rien à celle de Mahatma Gandhi. Vraiment. Mais les gens qui connaissons ne sont pas comme cela. Dans la vraie vie, les gens ont du mal à faire des divisions à plusieurs chiffres sans l’aide d’une machine à calculer, oublient parfois l’anniversaire de leur épouse et ont la gueule de bois le 1er janvier. Ils ne relèvent pas de la catégorie de l'homo economicus, mais l’homo sapiens. Pour simplifier les choses, nous nous référons désormais à ces espèces, l’une étant imaginaire, l’autre réelle, respectivement par des termes d’écônes et de simples mortels."

Dans leur livre, Thaler et Sunstein parlent d’architecture du choix, afin de cadrer les décisions des gens qui sont donc de faillibles simples mortels - et non pas d’écônes qui disposent de toutes les informations utiles pour faire le meilleur des choix. Et également de "paternalisme libertaire."

 

Architecture du choix: organiser le contexte dans lequel les gens prennent leurs décisions. "S’il entre dans vos attributions de concevoir le bulletin de vote qu'utilisent les électeurs pour choisir leur candidat, vous êtes architecte du choix. Si vous êtes médecin, appelé à décrire à un patient les différents traitements envisageables dans son cas, vous êtes un architecte du choix. Si vous élaborez le formulaire à remplir par les personnes qui viennent d’être recrutées afin de bénéficier de la couverture santé offerte par votre entreprise, vous êtes un architecte du choix. Si vous décrivez les avantages et inconvénients de divers cursus scolaires ou universitaires à votre fils ou à votre fille, vous êtes architecte du choix. Si vous travaillez dans la vente, vous l’êtes aussi."

Le paternalisme libertaire est une variété relativement bénigne et non intrusive de paternalisme: en effet, il n’enferme pas les gens dans des choix irréversibles, pas plus qu’ils ne les pénalisent en cas d’erreur. 

"Le paternalisme libertaire est une variété relativement bénigne et non intrusive de paternalisme: en effet, il n’enferme pas les gens dans des choix irréversibles, pas plus qu’ils ne les pénalisent en cas d’erreur. L’approche que nous recommandons doit tout de même être considérée comme paternaliste, car les architectes du choix, privés et publics, ne se contentent pas d’anticiper les décisions des individus ou de s’y conformer. Bien au contraire, ils tentent délibérément de les orienter dans des directions susceptibles d’accroître leur bien-être. Ils emploient la méthode douce, le nudge. Pour être considérée comme un simple nudge, l’intervention doit pouvoir être évitée facilement et à moindres frais. Les nudges n’ont aucun caractère contraignant."

Il faut concevoir des politiques susceptibles d’aider les membres les plus frustes de la société tout en imposant le moins de coûts possibles à ses membres les plus éclairés 

"Parce que la bonne décision n'est pas toujours la plus évidente, “Nudge est le petit coup de pouce décisif qui permet de faire pencher la balance du bon côté !" Un captivant ouvrage qui fera de vous des architectes du choix bienveillants.

Données techniques: "Nudge : La méthode douce pour inspirer la bonne décision," Richard H. THALER et Cass R. SUNSTEIN, 480 pages, ed. Pocket, juin 2012

Article rédigé par McGulfin / Fabien Salliou

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