De la prise de décision: Lorsque l’expérience nous égare, par Robin M. Hogarth, Emre Soyer

Soumis par Anonyme (non vérifié) le mar 29/03/2016 - 00:00
perdu

Comment ne pas se laisser s’égarer par l'expérience ?  Comment bien interpréter le passé ? Comment pleinement tirer profit des enseignements de ce qui fut ?, se demande la revue Harvard Business Review, édition française, Avril-Mai 2016

Et d'y répondre:

  • Analysez les échecs, et les processus décisionnels qui ont conduit à ces insuccès. Partagez, discutez ouvertement des points d’achoppements qui font que, cette fois-ci, la décision n’était pas la bonne. Remuer le couteau dans la plaie n’est jamais agréable. Le faire permet d’apprendre, de comprendre, permet de déterminer ce qui peut être mieux fait, ou différemment, à l’avenir. Il ne s’agit pas, ici, de former un tribunal de l’inquisition et de partir à la chasse aux coupables. Non, il s'agit d'étoffer votre expérience, de la rendre la plus complète et la plus précise possible - avec ses bons et ses mauvais côtés, avec ses zones de lumières (ses succès), et ses zones d'ombres (ses échecs qui font du mal à l'égo et qu'on voudrait planquer sous le tapis). L’expérience ne se résume pas aux succès. Elle est un patchwork d’échecs, de semi débâcles, de pseudo réussites, de triomphes. "En dissimulant la fréquence des échecs, l’environnement rend plus difficile d’en tirer des leçons. Au contraire, il nous pousse à croire que nous avons plus de prise sur le succès qu’en réalité." A ce propos, il existe une conférence "FailCon: Embrassez vos erreurs, construisez votre succès", dont le but est de communiquer sur ses erreurs, avec un mutuel objectif d'apprentissage.
  • Osez le conflit. "La première règle en matière de décision est qu’on ne rend de décision que s’il y a désaccord," Peter Drucker, consultant en management d'entreprise. Afin d’avoir une juste vision d'une situation, il est nécessaire de croiser les points de vues. Il est important de s’encadrer de personnes qui contestent, qui critiquent. Il est important de s’entourer de collaborateurs qui ne pensent pas comme vous. Il est important, aussi, de ne pas vilipender, fusiller les porteurs de mauvaises nouvelles. Au contraire, mieux vaut découvrir des failles quant à une future décision par l’intermédiaire d’un collègue, que par la voix du public. Dans le premier cas, il est plus aisé d’y remédier. Les collaborateurs d'une entreprise ne peuvent penser ensemble. Pour Margaret Heffernan, entrepreneuse, la plupart des organisations ne pensent pas. "Non pas qu’elles ne veulent pas, mais parce qu’elles ne peuvent pas." Selon une étude citée par Margaret, 85 % des cadres européens et étasuniens n'osent relever des points de conflits, par peur des conséquences qui en résulteraient, par peur de ne pouvoir gérer les désaccords. Par peur de poser des questions stupides et d'être jugé par ses pairs. Par peur d’être incompris. Le paradoxe, c'est que les entreprises ne cessent de trouver des talents, des gens brillants, mais ne cessent d'échouer à exploiter leur plein potentiel, leur compétence, à en tirer le meilleur parti.
  • Analyse pré-mortem, recul prospectif: désaccordez-vous. Au lieux de tomber dans le biais de confirmation, et de ne prendre en compte que les indices qui corroborent votre hypothèse, source de votre future décision, demandez-vous en quoi vous avez tort. Projetez-vous dans l’avenir et imaginez que votre décision a été un échec. Et soyez à l'écoute des faibles signaux, ces indicateurs qui peinent à s'exprimer. Et interrogez-vous: "Comment cela a pu se produire ? Quelle en est la cause ?" Une technique qui permet de déceler de potentiels problèmes.
  • Restez ouvert, ne vous focalisez pas. Soyez attentifs, accueillez l’inattendu. Ne tombez pas dans les biais décisionnels tels que l’aversion pour la perte -  nous accordons plus d'importance aux pertes qu'aux gains de même montant - ou l’escalade de l’engagement - nous investissons des ressources supplémentaires dans une décision vouée à l'échec, en raison des fonds, du temps et de tous les efforts déjà engagés. Pensez à des alternatives. Partez du principe que ce que vous avez choisi n’est pas une option, et demandez-vous : "Qu'est-ce que je peux faire d'autres ?"
  • Détachez-vous des simples résultats. Dans le contexte professionnel, pléthore d’entreprises sont attachées aux résultats. Comme si le résultat était sous leur stricte contrôle. Comme si la chance et l'heureux - ou malheureux - hasard n’était jamais de la partie. A ceux qui aiment le contrôle, mieux vaut s’attacher au processus décisionnel. De comment la décision est née ? "Le simple fait qu’un résultat paraisse évident, après coup, ne signifie pas qu’il était prévisible. Les décideurs tombent souvent dans ce biais rétrospectif, susceptible d’engendrer un excès de confiance et des illusions de puissances. En matière d’efficacité des décisions, ignorer qu’on ne peut pas prédire est un péché plus grave que de ne pas être capable de prédire." ( Lorsque l'expérience nous égare, Emre Soyer, Robin Hogarth, Harvard Business Review)

"Si nous croyons pouvoir apprendre quelque chose de nos expériences, pouvons-nous aussi apprendre que nous ne le pouvons pas ?," comme le demande Hillel Einhorn, l’un des pères de la décision comportementale. Recevez les leçons du passé avec un sens critique. Modifiez votre environnement décisionnel afin de faire des choix plus avisés, en pleine conscience, avec une vue à 360 degré. Quand nous osons voir, regarder, parler, et créer le conflit, "nous permettons aux gens autour de nous et à nous même de mieux réfléchir. L’ouverture n’est pas la fin. C’est le début, "explique Margaret Heffernan.

Source de ce billet de blog:

"Apprenez à décider ! Comment lutter contre vos préjugés pour faire les bons choix", dossier du magazine Harvard Business Review, Avril-Mai 2016

 

Article rédigé par McGulfin / Fabien Salliou

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