Décider, c’est un savant dosage d’art, et de science. Décider, c’est un saut dans l’inconnu, c’est trancher avec toutes les données que l’on a à disposition - et qui peuvent n'être que partielles. Comment décider au mieux ? Comment prendre une décision pertinente ? Pour Alan J. Rowe et Richard Luecke, auteurs de "L’essentiel pour bien décider" (Harvard Business Review), la prise de décision doit suivre une méthode, afin que ne règne pas la confusion, afin que le maximum d’alternatives soient prises en compte. Décider de manière efficace et en pleine conscience, c'est ce que nous proposent Alan et Richard.
Qu’est-ce que "décider" ? Selon le philosophe Charles Pépin, "la décision exige un saut au-delà des arguments rationnels, une confiance en son intuition. C’est précisément lorsque le savoir ne suffit pas que nous devons décider - du latin “decisio”: action de trancher. Une décision est toujours audacieuse: elle implique par définition la possibilité de l’échec," explique-t-il dans son ouvrage "Les vertus de l’échec", avant de rajouter: "La décision, affirmait Aristote, relève d’un art plus que d’une science. D’une intuition plus que du travail de la raison analytique. Cela ne signifie pas qu’elle soit irrationnelle: elle peut reposer sur un savoir, mais sans s‘y réduire."
Pour Alan J. Rowe et Richard Luecke, auteurs de l’ouvrage "L’essentiel pour bien décider", "être intelligent et travailler dur ne garantissent pas les performances. En l’absence d’une méthode efficace, nécessaire aussi bien à la fabrication de vis ou de voitures qu’à la prise de décision, le confusion règne." Pour décider de façon pertinente, c’est donc des outils que nous proposent Alan et Richard. Selon eux, un processus de prise de décision efficace et fructueux passe par cinq étapes.
1- Définir un objectif. En programmation neuro-linguistique, définir un objectif passe par 8 étapes, qui sont: Formulé positivement, Sous le contrôle de la personne, Testable sensoriellement, Contextualisé, Ecologie, Objectif de l'objectif, Le prix à payer, Cohérence par rapport à la direction à prendre.
2- Établir / poser les bases de la réussite. Créer les conditions favorables à une prise de décision efficace. Souvent les prises de décisions sont influencées par des facteurs qui vont à l’encontre d’une prise de décision rigoureuse: chamaillerie en interne, culture d’entreprise basée sur le pouvoir et le contrôle et qui tend à favoriser les choix conformes aux préférences des individus les plus puissants (que ceux-ci soient bien informés ou non, toute décision est alors prise au cas par cas, sans approche systématique). Normalement: des individus compétents participent au processus de prise de décision, la pensée créative et les échanges argumentés sont encouragés lors des réunions, nécessité de définir des règles de base qui déterminent le mode de décision.
3- Cadrer un problème. Une bonne décision dépend de la bonne compréhension des questions qui se posent et de leurs conséquences sur les objectifs de l’entreprise. Il est crucial de déterminer la nature du problème. Faire un choix en négligeant cette étape est voué à l’échec.
4- Identifier les alternatives. Après avoir cerné le problème, vous devez, en tant que décideur, envisager plusieurs solutions possibles. Sans alternative, il n’y a pas de vraie décision.
5- Évaluer les alternatives. Face à un choix, il vous faut évaluer la faisabilité, les risques et les implications de chacune des options qui s’offrent à vous. Faire le bon choix Analyse approfondie des alternatives. Dans les circonstances idéales, le bon choix est évident. Dans la réalité, les préférences personnelles, les malentendus et les divergences d’opinion rendent difficiles la prise d’une décision sans appel. Heureusement, des techniques existent pour surmonter ces difficultés set s’assurer que les avantages et les inconvénients de chaque option sont compris et débattus. Par exemple, par le jeu de balle, du point/contrepoint, et de l’analyse critique.
Richement documenté et pédagogique, l’ouvrage "L’essentiel pour bien décider" revient sur chacune de ces cinq étapes de la prise de décision, et propose pléthore d’outils afin de trancher au mieux lorsque nous sommes face à un choix. De ce guide pratique, voici, par exemple, trois techniques de prise de décision.
La technique "Jeu de balle"
"Cette méthode permet à la fois de développer les idées et d’encourager l'adhésion des participants à la décision finale." Un sentiment de responsabilité partagé.
Mode de fonctionnement:
- "Une première idée est “lancée” à un collaborateur qui y réfléchit."
- "Le collaborateur s’engage à l’étudier et à l’améliorer. "
- "Le collaborateur, une fois son travail de réflexion terminé, relance l’idée améliorée par ses soins au groupe, et une une autre personne attrape l’idée, et la perfectionne à son tour. Et ainsi de suite."
"L’idée suit un cycle de perfectionnement progressif jusqu'à ce que le groupe décide qu’aucune autre amélioration significative ne puisse plus être apportée."
La technique "Point / contrepoint"
C'est un principe d’amélioration itérative, par étapes, et qui implique deux équipes, deux groupes de personnes.
- "Séparez l’équipe de décision en deux groupes de taille égale, A et B. Veillez à ce que des partisans d’idées contraires soient présents dans chaque groupe "
- "Le groupe A rédige une décision accompagnée de recommandations, des principales suppositions et des arguments"
- "Le groupe A soumet sa proposition au groupe B lors d’une réunion"
- "Le groupe B identifie une ou plusieurs alternatives, en indiquant les principales hypothèses et en s’appuyant sur des données précises"
- "Le groupe B présente ses idées au groupe A au cours d’une deuxième réunion."
- "Lors d’une troisième réunion, les deux groupes débattent des deux propositions et identifient un ensemble commun de suppositions. Menez la réunion de sorte à ce que les deux groupes continuent à discuter de diverses options sans s’écarter des hypothèses communes. Le but ultime est que l’ensemble du groupe parvienne à un accord sur une recommandation."
"Cet exercice est un excellent moyen de s’assurer que tous les points de vue et toutes les observations personnelles sont pris en considérations."
La technique "Analyse critique"
"Comme la méthode point/contrepoint, l’analyse critique comment par la répartition des membres de l’équipe de décision en deux groupes. Au lieu que le premier groupe fasse une proposition et le second une contre-proposition, l’un critique l’approche de l’autre et lui demande d’améliorer l’idée de départ."
- "Divisez l’équipe en deux groupes de même taille, A et B Le groupe A rédige une proposition de décision, avec les recommandations, les principales hypothèses et les éléments justifiant cette décision.
- Le groupe A soumet sa proposition au groupe B au cours d’une réunion Le groupe B rédige une critique détaillée des hypothèses et recommandations du groupe A
- Le groupe B présente sa critique au groupe A au cours d’une deuxième réunion
- Le groupe A revoit sa proposition en tenant compte de l’avis émis par le groupe B
- Le groupe A présente son travail lors d’une troisième réunion
- D’autres réunions sont organisées pour critiquer et modifier la proposition jusqu’à ce que les deux groupes s’entendent sur une recommandation."
A cela, nous pouvons proposer une autre technique, la stratégie Walt Disney
- Le Rêveur. Levez les yeux. Regardez le ciel. Tout est possible. Il n'y a de limite à vos rêves que l'envie de les réaliser. Aucune barrière, aucun frein. Visualisez-vous en accomplissant votre objectif. Donnez-vous la permission d'y penser librement, sans inhibition. Enfin, changez de lieu, bougez de cette pièce qui vous a fait rêvé et passez au stade " Réalisateur."
- Le Réalisateur. "L’important n’est pas de prévoir le futur, mais de le rendre possible," Saint-Exupéry. Regardez devant vous et posez-vous cette question : "Qu'est-ce qui est réalisable aujourd'hui ?" Selon mes compétences. Selon mes moyens, etc. Comment réaliser mon rêve ? Vérifiez le plan que vous avez rêvé. Adapatez-le, précisez-le pour arriver à une séquence réaliste. Enfin, changez de lieu, bougez de cette pièce qui vous a confronté à la réalité et passez au stade " Critique."
- Le Critique. "Un intellectuel assis va moins loin qu’un con qui marche,"M. Audiard. La tête inclinée, les yeux baissés. Vous vous faites l'avocat du Diable. Après avoir rêvé l'objectif, après l'avoir confronté à la réalité "qu'est-il possible de faire à l'heure actuelle ?", critiquez. Sans compromis. Sans concession. Une fois cette séquence terminée, vous pouvez, si vous voulez, affiner votre objectif, et repasser dans le mode " Rêveur", puis " Réalisateur", et revenir au stade " Critique."
Bonus: l'approche par investigation, ou comment privilègier le dialogue sans prise de position "idéologique"
Données techniques: "L'essentiel pour bien décider", Alan J. Rowe et Richard Luecke, Harvard Business Review, 170 pages, mai 2017
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