La pensée extrême, Gérald Bronner

Soumis par Anonyme (non vérifié) le lun 01/02/2016 - 00:00
bronner

“Adolescent j’étais très croyant. J'ai découvert qu'on pouvait croire en des choses folles sans être fou. On peut avoir des raisons de croire sans raison, “ explique au micro de France Inter Gérald Bronner, sociologue et auteur de “ La pensée extrême: Comment des hommes ordinaires deviennent des fanatiques”.

“La radicalisation est un objet tellement complexe qu’il ne se laisse pas aborder par des explications simples [comme] le milieu social, le chômage. Dans l’histoire du terrorisme en général on a beaucoup de données, qui sont contre-intuitives. La caractéristique des personnes qui passent à l’acte ont plus de diplômes que la moyenne,” explique Gerald Bronner avant de rajouter: “Personne ne peut prédire qu’un individu va passer à l’action. Les individus dont on parle sont terriblement cohérents d’un point de vue moral. Cela peut les conduire à produire des actes pour éliminer tous ceux qui ne pensent pas comme eux.”

Comment alors des individus deviennent fanatiques ?

“Un ex adepte de l’ordre du Temple solaire m’avait donné une réponse qui m’avait frappée : « c’est un escalier dont les marches sont si petites que vous n’avez pas l’impression de les gravir ».” En fait, “le plus souvent les extrémistes sont des individus qui sont en pleine possession de leurs moyens intellectuelles. Mais alors, comment peuvent-ils endosser des croyances aussi manifestement déraisonnables ? C’est la une des pistes de résolution de l’énigme de l’extrémisme: il faut distinguer soigneusement la façon dont l’individu est conduit à croire et la croyance constituée qui, rendue publique, est l’objet de la consternation des commentateurs d’opinions.”

“Dés lors que nous ne parvenons plus à comprendre autrui, et plus nous le supposons animé par une forme d'irrationalité. En d’autres termes, nous interprétons ses actions comme la conséquence de cases et non de raisons. Nous supposons qu’il agit comme il le fait, ou qu’il croit ce qu’il croit, parce qu’il serait obscurément victime d’une passion irraisonnée, d’une maladie mentale ou d’un mystérieux déterminisme social. C’est particulièrement vrai lorsqu’il s’agit de rendre compte d’actions et de croyances, comme celle que manifeste la pensée extrême, qui sont inspirées par des systèmes de représentations auxquels nous n'adhérons pas et qui conduisent les individus à produire des actions que nous n’approuvons pas. Il faut passer outre la première impression d'irrationalité que nous pouvons avoir lorsque nous observons les croyances, les pratiques d’autrui qui nous paraissent étranges, voire que nous désapprouvons.”

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Article rédigé par McGulfin / Fabien Salliou

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